Signature en NBA avec les Celtics, franchise de Boston, et première Coupe de Monde avec les Bleus (qui débute ce samedi)… À 25 ans, Vincent Poirier prend une autre dimension. Une ascension qui ne surprend pas ceux qui l’ont côtoyé. De son premier entraîneur à sa mère.
“Vincent Poirier, 34e”. Anne-Laure mime un clap de cinéma dans un coin du complexe sportif Laura Flessel de Bussy-Saint-Georges (Seine-et-Marne). “On commence à avoir l’habitude des caméras et des micros”, s’amuse à dire la maman de l’international français, assise devant deux panneaux à la gloire de son fils, le mot fierté inscrit derrière elle.
A 17 ans, “il ne connaissait rien au basket”
Depuis quelques mois, l’entourage du pivot de l’équipe de France est sollicité. Il faut dire que le parcours de Vincent Poirier sort de l’ordinaire. Défenseur central au club de foot de Bussy, le grand Vincent (2,13m), fan du PSG, est repéré par Serge Girabault, entraîneur du club de basket de la même ville. En 2010, Vincent a 17 ans: “il ne connaissait rien aux règles du basket, il était juste le grand qui marquait le plus près possible du panier, raconte-t-il. Il avait déjà des qualités athlétiques naturelles, allait plus vite que les autres ailiers mais il a commencé à travailler très tôt et plus que les autres car il était conscient qu’il avait du retard.”
Grâce à ce travail acharné, Vincent gravit les échelons. Frédéric Fauthoux, entraîneur de Paris Metropolitans (Jeep Elite), lui donne d’abord sa chance. Première expérience compliquée. L’intérieur est prêté à Hyères-Toulon puis signe un contrat ASHN (double-licence permettant de jouer pour un club professionnel et avec le Pôle France à l’INSEP en NM1, troisième division).
Ici, il se découvre une qualité de leadership. “Il faisait du bien au groupe, explique Tahar Assad-Liégeon, directeur du Pôle France basket qui a vu passer les jeunes Diot, Batum, Fournier et consorts. Il était un peu plus âgé que les autres, d’un ou deux ans ce qui lui donnait ce côté de leader, ça lui a beaucoup servi. Il a appris à prendre des initiatives.” Un atout permettant au poste 5 de s’imposer aux Metropolitans pour ensuite passer un cap à Baksonia, en Espagne puis rejoindre les Celtics de Boston en NBA pour un contrat de deux ans. “C’est un ascension fulgurante… pas inespérée parce qu’on savait qu’il pouvait aller très haut mais aussi vite, c’est une surprise pour moi”, avoue Frédéric Fauthoux, l’entraîneur qui l’a lancé dans le monde professionnel, depuis les tribunes du Palais des Sports Marcel-Cerdan.
“Il peut avoir un grand rôle en Chine”
Le 28 août dernier, après un huitième match de préparation face à la Serbie, Vincent Collet établit sa liste pour la Coupe du Monde en Chine. Au poste 5, Rudy Gobert, Matthias Lessort et… Vincent Poirier. “Ce n’était pas une surprise, il était prévu dans la liste, avoue Anne-Laure, sa maman. Il ne me l’a pas appris, j’ai regardé sur Internet… Poirier, ok.” Il faut dire que le clan Poirier n’avait pas de soucis à se faire, le pivot a plutôt rassuré sur les matchs de préparation notamment face au Brésil (16 points, 7 rebonds, 4 passes décisives et un contre en 17 minutes).
Ce dimanche, Vincent va donc découvrir la Coupe du Monde avec les Bleus. La Chine, le pivot la connaît pour y avoir disputé les championnats du monde universitaires en 2015. S’il a disputé l’Euro il y a deux ans avec l’équipe de France, il peut cette fois aspiré à plus de temps de jeu selon Frédéric Fauthoux: “Quand vous terminez meilleur rebondeur et dans le deuxième 5 majeur de l’Euroligue la saison dernière ce n’est pas du hasard. Il peut avoir un grand rôle en Chine car il colle à la philosophie de jeu prônée par Vincent Collet. Il sait se sacrifier pour l’équipe et puis son gros progrès, c’est son jeu de passe. Il sait orienter le jeu, pour un poste 5 moderne c’est très important.”
Face à l’Allemagne, la Jordanie et la République Dominicaine, les Bleus font office de favoris en phase de groupe. Les choses se corseront ensuite au milieu de nombreux prétendants aux dents longues comme la Serbie, l’Espagne, la Grèce, l’Australie sans oublier la Team USA (bien qu’amoindrie). Le premier entraîneur de Vincent Poirier, Serge Gabirault, reste lui confiant: “Ça peut le faire! En tout cas on ne doute pas une seconde que si la France ramène une médaille, Vincent viendra la présenter aux jeunes joueurs. Ici, c’est un modèle. Quand les jeunes voient les affiches de Vincent en plein match avec le maillot de l’équipe de France, qu’ils savent qu’il vient d’ici, ils se disent pourquoi pas eux.”
Taille 51-52 et installation à Boston
Si médaille il y a, il faudra trouver de la place chez maman Poirier. “Au milieu des trophées? (hésitations)… surtout au milieu des chaussures, plaisante-t-elle. Il ne va pas être content que je dise ça mais il y en a partout et quand tu chausses du 51-52…” La potentielle médaille prendra donc la direction de Boston, où il débutera une nouvelle aventure. Sur Instagram, le pivot a tenu à poster un message à ses fans. “Aujourd’hui, je réalise mon rêve en intégrant la NBA et la mythique franchise des Boston Celtics, expliquait-il. J’ai une grosse pensée pour ma famille, mes amis et proches et plus particulièrement pour mon père qui, je le sais, me regarde de là-haut.” Message touchant pour un homme rarement émotif. “Ses sentiments, il les intériorise. C’est un homme de fer dans un gant de velours. Il a surtout beaucoup d’humour, parfois trop même…, poursuit sa mère. Vincent fait aussi preuve de détachement, il sait avoir du recul sur le basket et c’est bénéfique pour lui.”
Médaillé ou pas, Vince – comme il est surnommé par ses amis – rejoindra donc le Massachusetts après le Mondial pour débuter son rêve NBA. Sa vie américaine l’attend, le logement est trouvé dans le coeur de Boston et sa petite amie traversera l’Atlantique avec lui, à l’inverse de son bouledogue anglais de 4 ans. Un déchirement pour le joueur de 25 ans. “Vincent et Piwee c’est toute une histoire, poursuit sa mère. Ils se suivent tout le temps. Malheureusement, je dois le garder. Les longs vols sont interdits pour les bouledogues à cause de leurs problèmes respiratoires.”
Décrit comme très sociable par ses proches, le nouveau Celtic ne devrait pas avoir de mal pour s’intégrer à Boston. Reste désormais à confirmer sur le célèbre parquet du TD Garden mais une chose est sûre, Vincent a encore beaucoup à prouver et à vivre avant de ranger ses chaussures.
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